Paris, un autre temps, une autre époque. Paris, lorsque la grande Dame, la nôtre, fut si belle. Paris, lorsque les couleurs me prirent d’émotions. Ce fut un bref passage dans ton histoire, ce fut une éternité dans ma vie. Paris, toi à qui j’ai laissé la majeure partie de ma jeunesse. Paris, la sauvage. Paris, la douce. Paris, la terrible. Paris, la géniale. Paris, tu étais si belle jadis. Tu l’es sans nul doute encore. Paris, tu n’as pas changé, mais moi.
L’aéroport avale ses milliers de voyageurs, Pour assouvir son énorme appétit vorace, Sa bouche dévore des mets de toute race, Ce délicieux festin le remplit de bonheur.
Ils vont à Sydney, ils vont à Moscou, ils vont à Paris, En s’élevant à des milliers de mètres du sol, Peuvent même traverser les deux pôles, La destination ne dépend que de leurs envies.
Installé sur son siège, on s’endort à Tokyo, Durant quelques heures de sommeil profond Et de rêves remplis de chevaliers et dragons, On ouvre les yeux dans un aéroport à Rio.
On peut aussi voyager sans bouger de place En tirant les ficelles de son imagination Pour concocter une délicieuse potion À consommer les jours où la vie est une garce.
Mais rien ne remplace la perception par la rétine D’un coucher de soleil au bord du vide Ou au bord d’une eau claire et limpide Même une imagination débordante et fine.
Alors sortez, voyagez et découvrez, Avant qu’il ne soit beaucoup trop tard Pour respirer l’air frais montagnard, Restez immobile et vous mourrez.
Rose avait dans les vingt-quatre ans et pour elle, cela signifiait vingt-quatre années de tourments et de souffrances. L’un de ses oncles prenait le soin de tendrement abuser de son innocence de jeune fille, puis d’adolescente (quoiqu’elle ne fut pas aussi innocente à cette période de sa vie). Elle le détestait. Elle s’était promis qu’un jour, elle aurait le courage de lui ôter la vie et ses testicules avec.
Ses parents faisaient mine de ne rien remarquer, ce qui avait d’autant plus le don de l’agacer au plus haut point. Elle détestait ses parents pour cette raison. Car en dehors de cela, ils étaient plutôt gentils avec elle, sans toutefois être les parents de rêve, elle estimait qu’elle n’avait pas à se plaindre.
Côté scolarité, cela tenait davantage du miracle qu’elle ne fut pas déjà renvoyée de ses différents établissements ou qu’elle ne fut pas placée dans un centre de détention juvénile. Elle avait un don particulier pour s’entourer des mauvaises personnes. Aussi, ces dernières avaient une certaine influence nocive sur elle. Rose était devenue une mauvaise personne à partir du collège. Mais elle avait l’impression d’avoir des amis et des copines… Elle ne s’était nullement interrogée sur ces personnes. Elle ne s’est jamais posée la question suivante : « Qui serait prêt ou prête à prendre une balle pour moi ? » Elle aurait bien vite compris que son amitié n’était qu’illusion et artifice.
En terminale, elle avait appris une bonne nouvelle : son oncle pédophile était décédé dans un accident de voiture. Ce dernier avait pris le volant après une soirée arrosée et avait fauché une femme enceinte avant d’aller s’encastrer dans un mur de banque. Elle ne put cacher sa joie à l’annonce de cette nouvelle, ce qui lui valut un sacré sermon de la part de son père. Cette nouvelle fit l’effet d’une bombe pour elle, elle était décidément libérée d’un poids. Puis, elle se dit que son oncle avait été une ordure jusqu’au bout, même mourir, il n’avait pas pu le faire seul, il fallait qu’il entraîne la vie d’une innocente avec lui.
Elle avait difficilement obtenu son bac puis, après quatre mois d’études supérieures, elle décida d’abandonner cela et de commencer à travailler. Elle avait décroché un job en tant que femme de chambre dans un hôtel près du domicile de ses parents. Tout commençait à rentrer dans l’ordre. Elle avait mis un peu d’argent de côté, pour plus tard ou pour les imprévus.
Rose avait commencé à fréquenter l’un de ses collègues, qui était à la réception de l’hôtel. Ils se virent pendant quelque temps avant de se décider à baiser. Leur première fois ne fut pas terrible, mais les fois suivantes étaient de plus en plus proches de l’extase ultime. Après quelque temps, ils commencèrent à discuter sérieusement de s’installer ensemble, voire de fonder une famille.
Un jour, alors qu’elle était en plein travail, elle entendit son téléphone portable retentir. Mais elle n’y prêta pas attention, car elle avait presque terminé son service. Tout de suite après, son téléphone sonna de nouveau. Avec une ribambelle de jurons, elle le sortit de sa poche et regarda l’écran : « Numéro masqué », elle le remit dans sa poche. Alors qu’elle mettait les draps sur le lit de sa dernière chambre, sa manager vint en courant la voir, le téléphone à la main. « Rose, Rose ?!
Oui, madame Rubben ?
Rose, oh, mon Dieu, je suis désolée… mais il faut vraiment que tu prennes cet appel, dit madame Rubben en fondant en larmes.
Mais qui c’est ? » Madame Rubben sanglotait et ne parvint pas à lui répondre. Rose comprit tout de suite que quelque chose n’allait pas.
Elle prit le combiné, l’approcha de son oreille et se racla la gorge : « Oui, allô ?
Vous êtes Rose Nastor ?
Oui, oui, c’est bien moi. Qui est à l’appareil ?
Ecoutez madame, je suis navré d’avoir à vous annoncer cela, mais vos parents sont décédés dans un accident d’ascenseur. » Le sapeur-pompier au bout du fil n’eut même pas le temps d’en dire plus que Rose avait envoyé valdinguer le combiné contre le mur et fondit en larmes. Madame Rubben tenta en vain de la consoler, mais Rose était devenue hystérique. Elle pleurait à chaudes larmes, puis ôta sa tenue de travail et sortit de la chambre en sous-vêtements. Dans la rue, tous les passants se retournaient et faisaient le signe de croix.
Elle rentra directement chez ses parents, mais elle n’avait pas son sac à main où se trouvaient ses clés. Elle prit une brique pour briser l’une des vitres de la cuisine et entra ainsi. Elle se taillada la cuisse au passage. Elle saignait abondamment. Dans le salon, elle ouvrit l’un des placards et sortit une bouteille de whisky et but une longue rasade au goulot avant de s’en verser sur sa plaie ouverte. Elle mit un pansement dessus dans la salle de bain. Le sang semblait s’être arrêté de couler. Elle s’habilla en vitesse et appela le 18.
La conversation avec l’opératrice était un peu compliquée, car entre les sanglots de Rose et le flegme de l’opératrice, elle mit bien une demi-heure avant d’obtenir ce dont elle avait besoin.
Elle se rendit aussitôt à la morgue. Elle fut prise en charge et on lui demanda d’identifier les corps. Elle pleurait toutes les larmes de son corps, mais l’un des personnels de la morgue lui tendit la carte d’un psychologue. Elle trouva cela humiliant au plus haut point, mais n’avait pas la force de lui conseiller de se la mettre là où elle pensait.
Elle s’occupa ensuite de toutes les démarches administratives qui suivent un décès. Elle était étonnée par la capacité qu’avait son corps à régénérer ses larmes. Une fois tout cela fait, elle avait la date de l’enterrement, ç’allait être dans cinq jours.
Elle rentra à l’hôtel où elle travaillait pour récupérer ses affaires et rentra à la maison de ses parents. Au moment où elle inséra la clé dans la serrure, elle fondit en larmes et elle s’écroula au sol. Elle resta ainsi durant près de deux heures à pleurer. Certains voisins et passants restaient plantés devant elle et la regardaient avec un air de pitié, mélangé à du dégoût.
Lorsque le froid lui devint insupportable, elle se releva et rentra dans la maison. Là, de nouveau, elle se mit à pleurer durant de longues minutes. Puis, comme elle avait besoin d’un peu de réconfort, elle appela son copain. Celui-ci répondit au bout de la première tonalité.
« Rose ? Je suis désolé, vraiment désolé. Je me suis dit que c’était peut-être malvenu de t’appeler aussi rapidement. Rubben m’a annoncé ça tout à l’heure…
J’ai besoin de te voir. Tu peux venir là ? Tout de suite ? dit-elle en sanglotant.
Écoute Rose. Je dois te dire quelque chose. Ce n’est pas le moment, mais je ne peux plus garder cela pour moi.
Viens et tu me le diras en face. J’ai besoin de toi, s’il te plaît, Sacha…
Non, écoute-moi Rose. Je ne vais pas venir.
Mais pourquoi ? cria-t-elle en fondant en larmes.
Rose ? Je suis séropositif. Et comme on ne s’est pas toujours protégé… tu devrais faire des tests. » Là, il raccrocha. Rose tenta de le rappeler, mais il ne répondit pas. Elle n’était pas sûre d’avoir bien entendu. En réalité, elle avait parfaitement entendu, mais elle pria pour que cela ne soit que le fruit de son imagination.
Au bout d’une dizaine de tentatives, elle abandonna. Le monde semblait se dérober sous ses pieds. Elle s’allongea à même le sol dans le salon et contempla les craquelures du plafond tout en pleurant. Elle finit par s’endormir aux aurores et lorsqu’elle se réveilla, elle appela aussitôt Sacha. Pas de réponse de sa part. Elle appela madame Rubben et lui demanda si ses parents étaient morts. Cette dernière fondit en larmes et lui affirma que oui. Ce n’était donc pas un cauchemar.
Elle avait essayé d’aller voir Sacha, mais celui-ci était parti précipitamment selon sa propriétaire. Elle se mit à le détester à vouloir le tuer. À l’hôtel non plus, il n’avait guère plus donné de signes de vie. Elle finit par se résoudre à l’idée qu’il valait mieux qu’un tel enfoiré sorte de sa vie.
La veille de l’enterrement, elle reçut une lettre de Sacha remplie d’excuses et de mea culpa. Il lui disait qu’il était désolé de ne pas avoir eu la force de faire face à tout cela. Qu’il l’aimait au plus haut point, mais qu’il ne la méritait pas. Avant même de terminer de la lire, elle la déchira et la jeta à même le sol.
Le jour de l’enterrement, elle se réveilla aux alentours de 4h du matin. Elle n’avait fermé l’œil que durant quelques minutes. Elle avait l’impression d’être dans une dimension parallèle. Elle n’arrêtait pas de penser que tout cela n’était qu’un terrible cauchemar. Un cauchemar perpétuel duquel elle ne parvenait pas à se réveiller.
Elle resta assise sur son lit durant de longues heures avant de décider d’aller prendre une douche et de s’apprêter. Elle enfila un tailleur noir et un manteau tout aussi noir. Elle se regarda dans le miroir et fondit en larmes. Elle était sur le point d’enterrer ses parents, les fondations de sa vie, ses repères… comment allait-elle pouvoir vivre sans eux ?
Elle se repoudra, car les larmes l’avaient amochée et elle sortit. Elle devait prendre le métro, car le cimetière n’était pas tout près. Après cinq minutes de marches, une pluie glaciale vint la martyriser. Elle accélérera le pas.
Une fois dans le métro, le tableau d’affichage indiquait que la prochaine rame allait arriver dans sept minutes. Elle regarda autour d’elle et ne vit que de la tristesse sur le visage des gens, du dégoût, un dégoût de cette vie morose et monotone. Elle se mit à pleurer, car elle se rappela que dans quelques instants, elle allait enterrer ses héros.
Lorsque la rame arriva en station, elle se leva précipitamment et courut vers le bord du quai. Lorsque la rame fut à son niveau, le conducteur pila, mais l’allure du métro était encore trop importante pour s’arrêter à temps. Elle s’élança dans le vide et l’avant de la rame vint lui briser ses cotes et son crâne fut envoyé vers les rails avec une violence inégalée. Son corps sur les rails, le métro lui passa dessus et déchiqueta sa chair blanche, des lambeaux imbibés de sang voltigeaient dans l’air tels une œuvre d’art abstraite.
Sur le quai, les autres usagers furent abasourdis. Des cris d’effroi et de terreur se firent entendre de-ci, de-là. Certains cachaient leur visage, quand d’autres, plus curieux tentaient d’apercevoir le cadavre de Rose.
Elle était méconnaissable lorsque les pompiers virent ramasser ce qu’il restait de son corps frigide. Ils en avaient vu d’autres, mais l’état dans lequel elle était fit avoir des haut-le-cœur à plus d’un des pompiers.
Ainsi, Rose n’avait pas eu à subir l’enterrement de ses parents. Elle n’avait pas eu à subir le stress inouï quant aux résultats de sa prise de sang relative au VIH. Elle était en paix désormais. Plus rien n’avait d’importance. Elle allait rejoindre ses deux parents dans ce paisible havre de paix…
Tom aimait la vie, de manière générale. Tom était ce qu’on peut appeler communément un bon vivant. Mais Tom était, avant toute chose, un rêveur né. De nature quelque peu terre-à-terre, Tom se posait souvent la seule vraie question que tout homme normalement constitué se pose : « Comment devenir riche ? »
Alors, bien sûr, il y avait la solution qu’on nous enseignait dès notre enfance, c’est-à-dire travailler. Mais Tom connaissait pertinemment l’étymologie du mot « travail ». C’était la raison pour laquelle il était le genre d’Homme qui ne se tuait à la tâche que moyennement. Attention, n’allez pas croire qu’il n’avait pas d’emploi, non, il travaillait bel et bien. C’est simplement qu’il ne s’attendait pas à mener la vie dont il rêvait chaque soir uniquement grâce aux revenus de son travail.
Souvent, il essayait de trouver une réponse à sa fameuse question relative à la richesse. Bon, on ne peut pas affirmer que ses premières idées furent des plus prometteuses.
Avec un physique plus qu’acceptable, il a bien pensé à faire gigolo… Seulement, l’idée de coucher avec une femme de l’âge de sa mère l’écœurait quelque peu. Même si, il est utile de préciser qu’après quelques verres de bourbons, il peut revenir sur cette idée. Mort saoul, lors d’une partie de poker, il avait tout de même affirmé qu’il était prêt à baiser sa mère s’il perdait.
Oublions l’idée de vendre son corps alors. Que lui restait-il ? Faire des affaires, bien évidemment. Comment pouvait-il s’y prendre ? Le commerce étant un secteur hautement concurrentiel, il va lui falloir une idée géniale ou alors beaucoup d’innovation. Avec des marges de près de 300 à 400%, le secteur des substances illicites semblait la parfaite solution. Seulement, là encore, il y avait un hic. Tom était un jeune mec avec la bouille en brie de Jack Palance, une coupe au gel, le muscle saillant… et du haut de son mètre cinquante, il était difficile d’imaginer qu’il pourrait impressionner ses éventuels détracteurs. Conclusion : Tom n’était pas forcément taillé pour vendre de la cocaïne.
Mais alors, comment devenir multimillionnaire à l’image de Dan Bilzerian ? Cette question le hantait au quotidien. La réponse, il la trouva aux aurores. Un matin, se rendant au travail de bonne heure comme tout bon salarié qui se respecte, il leva les yeux vers une affiche publicitaire dans le métro parisien… et là, éclair de génie ! Mais oui, dire que c’était devant ses yeux depuis tout ce temps !
Son Saint Graal tenait en deux mots : paris sportifs ! Mais oui, s’il y avait bien un domaine où l’on pouvait se faire de l’argent facilement, c’était bien celui des paris sportifs.
Ne sachant pas très bien quelle technique adopter au départ, il choisit d’y aller d’une manière qu’il appréciait à tout point de vue : de la manière forte. Cela se traduisait par des mises surdimensionnées sur des équipes de football issues de villes qu’il ne savait même pas situer sur une carte.
Ce qu’il y a de vicieux avec les paris, c’est que bien souvent, les premières fois, on a tendance à gagner. Cela altère la perception de ces jeux d’argent et on en vient vite à penser qu’il s’agit effectivement d’une façon simple pour faire fortune. Tom n’a pas été épargné par cette règle. Il a gagné de fortes sommes d’argent au départ de sa carrière de parieur fou. Ce qui le poussa à augmenter ses mises et à les diversifier.
Croyant avoir trouvée sa ruée vers l’or, il pariait de façon frénétique, il était comme possédé par le démon des jeux. Sans qu’il s’en rende compte, il dilapidait son pécule au fur et à mesure. Et comme la chance n’est pas toujours du côté qu’on le pense, il perdait régulièrement. Mais que fait-on quand on perd ? Et bien, on tente de se « refaire ». Traduisez cela par miser davantage.
Il s’agit-là d’un cercle sans fin dans lequel, une fois embarqué, on a du mal à s’en sortir. Et c’est exactement ce qui était en train d’arriver à Tom.
À force de tuyaux manqués, de paris farfelus ou autres combinaisons douteuses, il en arriva à un point où, il dut revenir à l’une de ses premières idées pour effacer ses ardoises… Il faut savoir que certains prêteurs sur gage sont grandement adeptes des fellations…
Mais n’oubliez pas le mot d’ordre : la prochaine fois, on va se refaire.